14/03/2020



ET LE SCORFF CONTINUE SA COURSE VAGABONDE
Dans sa jolie vallée, si verte et si bretonne...
                                                                                    Louis Hubert

Les cours d'eau sont des artères de notre territoire : c'est autour des fleuves et des rivières que les hommes se sont souvent installés. Dans le temps, Ils ont aménagé des gués, des ponts, des moulins, tiré profit de la force du courant en construisant des barrages et des forges. Ils y ont pêché en créant des pêcheries, des étangs y puisant pour son alimentation et l'abreuvement de ses bêtes. L'eau est aussi présente par les fontaines et les lavoirs témoignages encore présents d'un passé récent bien avant son arrivée au robinet.
C'est cette histoire, de l'eau et de l'homme, à travers notre rivière, le Scorff, que nous voulons vous conter par épisodes.
Ce thème fut l'occasion d'une exposition qui eut lieu à la médiathèque de Guémené en 2019.


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FRANCHIR LA RIVIÈRE

Bien que peu profond et uniquement navigable dans son estuaire entre Lorient et Pont-Scorff, le Scorff a constitué très tôt un axe de circulation vers l'intérieur. Gués et ponts ont relié les deux rives.


LES GUÉS
Ar roduioù

Les premiers habitants de la vallée ont franchi le Scorff là où le niveau de la rivière est suffisamment bas pour permettre sa traversée à pied en aménageant des gués.

Afin de répondre aux variations du niveau d'eau selon les saisons, le passage est souvent amélioré par l'ajout de pierres plates dans le lit de la rivière.

Ces gués, sûrement nombreux, ont tous été détruits. On a néanmoins la certitude qu'il y en avait à St Houarno ou Ploërdut, à Guémené-sur-Scorff, au Roc'h à Arzano et au Bas-Pont-Scorff.

Reconstitution de la Roche Moisan

Au 11è siècle, la seigneurie de la Roche Moisan s'installe à Arzano : une tour bâtie sur une motte castrale contrôle le passage sur le Scorff. Malgré le transfert de la seigneurie au 15è siècle, le site reste jusqu'à la construction du Pont Kerlo en amont au 19è siècle, le point de franchissement entre le Morbihan et le Finistère. Sous l'actuelle passerelle, la pile centrale et la base des deux piles latérales du 18è siècle sont bien préservées.


Le gué de Pont Bihan à Guémené-sur-Scorff, constitué de gros blocs de granit, permettait d'accéder au moulin tout proche. La petite retenue d'eau a servi de lavoir. Conservé jusqu'au 20è siècle, il est remplacé par une passerelle s'appuyant sur les pierres de l'ancien gué.


LES PONTS
Ar pontoù

Au Moyen-Âge, le développement des échanges et la création de voies commerciales reliant les villes de marché nécessitent la création de véritables ponts constitués de piles et d'arches.

Les grandes seigneuries s'établissent en ces lieux stratégiques donnant naissance aux deux villes historiques de la Vallée, Guémené-sur-Scorff et Pont-Scorff.

Les ponts se multiplient sous l'Ancien Régime mais il faut pourtant attendre le 19è siècle pour pouvoir traverser le large estuaire du Scorff entre Lanester et Lorient, le passage le plus proche se situant à 12kms de la mer, au Bas-Pont-Scorff.

Cette évolution annonce, avec les nouveaux moyens techniques, la densification du réseau routier et la multiplication des ponts tant sur le Scorff (42 actuellement) que sur ses affluents.



Entre Pont-Scorff et Cléguer, le Pont Saint-Jean est constitué de quatre arches en arc segmentaire (18è s) et de trois piles (16è - 17è s) renforcés en amont par des avant-becs en forme d'éperon. Par son implantation stratégique, au point de rupture de charge des marchandises, entre le fleuve et la route, il contribue au développement de la ville de Pont-Scorff.

Le pont de Kerentrec'h

C'est en 1822 qu'est édifié le premier pont en charpente sur le Scorff entre Lorient et Lanester à la place du bac à péage, mis en service en 1733. Mal entretenu, il est remplacé en 1848 par le pont de Kerentrec'h (179,50 m de long), puis en 1960 par le pont Saint-Christophe. C'est aussi en 1862 qu'est construit le pont de chemin de fer.



Connu sous le nom de Pont-Brûlé, le pont de bois est construit entre Caudan et Quéven vers 1942 par les Allemands, en amont du pont Saint-Christophe, pour renforcer le franchissement du Scorff. Il a été détruit par les bombardements alliés.


Sur les routes, le recours aux buses pour franchir les rivières constitue, par la modification de la pente et de la vitesse d'écoulement de l'eau ou par la création d'une chute, un obstacle sérieux à la migration des poissons et de la loutre (effet repoussant).


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LA FORCE HYDRAULIQUE

Le débit du Scorff est irrégulier avec parfois des crues importantes et destructrices. En hiver son cours s'apparente à celui d'un torrent, notamment en vallée de Pontkalleg. L'homme a souhaité domestiquer le courant en édifiant des barrages permettant de canaliser et de régulariser le débit de la rivière tout en profitant de cette énergie.



MOULINS et BARRAGES
Melinioù ha bardelloù

Chaque moulin était la propriété d'un seigneur qui en retirait un revenu. Leur multiplication dès le 16è s. et pendant trois siècles a entraîné un suréquipement hydraulique sur bon nombre de cours d'eau. Plus d'une trentaine de ces constructions sont ainsi répertoriées sur le Scorff.

Dans leur grande majorité, ce sont les moulins à céréales mais deux moulins à papier ont existé au Paou entre Plouay et Guilliomarc'h et à Kerduel en Lignol. Des moulins à tan sont aussi répertoriés sur Guémené et Pont-Scorff.


Alors que bon nombre d'entre eux sont intégrés dans un système économique rural jusqu'aux années 1950, plus aucun ne fonctionne actuellement. Au mieux, certains moulins sont devenus des résidences privées.


Ces barrages, considérés comme des obstacles à la remontée des saumons, par exemple, comportent maintenant des passes permettant aux poissons de remonter le cours du Scorff.


Le moulin, c'est bien entendu le bâtiment avec la (ou les) roue qui permet au système de meunerie de fonctionner. C'est aussi un barrage ou un seuil qui assure la dérivation du cours d'eau. Il est constitué d'un remblai à la base mais la crête de l'ouvrage est renforcée par une construction maçonnée qui répond à des caractéristiques bien précises afin de maîtriser la poussée de l'eau.

          
                                                      
FORGES
Govelioù

Entre 1825 et 1838, les forges utilisent la force hydraulique générée par l'étang de Pontkalleg ("forges d'en haut" pour la fonte) et le Scorff ("forges d'en bas" à l'anglaise pour la transformation de la fonte en fer marchand). Peu productives, elles sont vite abandonnées : il en reste quelques bâtiments et d'imposants vestiges de canalisation.
         
          
Les "forges d'en haut": le minerai de fer est versé dans la cuve du haut fourneau par le gueulard (1) avec le charbon de bois.... en forêt de Pontkalleg et des coquilles marines. Une soufflerie hydraulique alimentée par l'eau de l'étang (2) active la combustion. La fusion achevée, la fonte s'écoule dans les raies tracées dans le sol (3) pour former des lingots.                                                           


ÉNERGIE HYDROÉLECTRIQUE
Energiezh dourdredan

L'énergie hydraulique a aussi généré des micros-centrales hydroélectriques sur la rivière. A Plouay, durant la seconde guerre mondiale, une petite turbine a été installée sur une pile de la pêcherie de Fanquigo pour alimenter le village. Ailleurs, les moulins se sont dotés de turbines leur assurant une indépendance énergétique.                                                                
                       

Le barrage du Grayo alimentait une turbine électrique. Deux passes à poissons ont été aménagés, une en pierre à gauche et un système plus complexe en béton à droite. Elles facilitent la remontée des saumons. Au centre une glissière pour la descente des canoës.

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LA RESSOURCE ALIMENTAIRE

De tout temps, la rivière est nourricière. Les saumons, truites et anguilles ont fait la réputation du Scorff. Chaque coin à saumons portait un nom que les pêcheurs connaissaient. Mais d'autres moyens de pêche ont existé.


LES PÊCHERIES
Ar goredoù

Les pêcheries son composées de deux digues de pierre, ar scluch en breton, qui forment un goulot d'étranglement débouchant au centre de la rivière. Deux à quatre passes complètent cet aménagement.
Les digues sont reliées par des passerelles en bois sur lesquelles, au niveau des passes, sont fixées des glissières verticales où s'encastre le guideau (carré de bois) auquel est accroché un filet ou sac de toile.

Ces pêcheries appartiennent sous l'Ancien Régime aux abbayes et aux seigneurs. Sur le Scorff, les comtes de la Châtellenie de la Roche Moisan (Arzano) montrent au 15è siècle qu'elles leur procurent d'importantes ressources.

Destinées à la pêche aux anguilles, les pêcheries servent aussi à la capture au saumon en fond de ria comme au moulin des Princes à Pont-Scorff dont le produit est vendu à Paris au 19è siècle.

Ces installations se multiplient au cour des siècles aux abords des moulins et villages riverains(une quarantaine sur le Scorff). Mais les droits seigneuriaux disparus à la Révolution, l'État contrôle la gestion des pêcheries dont la restauration est soumise à des réglementations.
Les pêcheries non entretenues se ruinent rapidement. Devenues des obstacles, elles sont parfois détruites par l'homme : rares sont celles qui sont conservées aujourd'hui.

Reconstitution de la pêcherie du Roch Arzano-Plouay

Les guideaux sont posés aux premières crues se l'automne et la pêche se pratique de nuit rapportant jusqu'à 30 ou 40 kg d'anguilles. ce type de pêche donne lieu à des pratiques communautaires, les habitants se relayant pour relever les filets toutes les heures. Après la Révolution, la pêche est distribuée dans les villages alentours. A Plouay, vers 1950, les anguilles sont acheminées chez une commerçante puis vendues sur Hennebont.

La pêcherie du Roch, après restauration


Les vestiges de pêcherie sont très nombreux sur le Scorff. Il ne reste de certaines qu'un petit barrage de pierrailles.



Anguilles et saumons font l'objet de toutes les convoitises. Les braconniers les pêchent notamment au niveau des pêcheries, rivalisant d'imagination pour les capturer, utilisant par exemple des foënes.



LES ÉTANGS
Ar lennoù

Les seigneurs disposent d'une autre source d'approvisionnement, les étangs et viviers, installés à proximité des manoirs et châteaux, fournissant par exemple des carpes dont l'élevage est connu depuis l'Antiquité.

Ces étangs confortent l'autorité de leur seigneur. On en repère trois en Vallée du Scorff, encore conservés et installés sur ses affluents à Pontkalleg (Berné), Tronchâteau (Cléguer) et le Verger (Gestel). Ils ont perdu leur fonction alimentaire et ne sont plus entretenus.

Par ailleurs, la multiplication des plans d'eau (550), créés pour l'agrément et l'irrigation en agriculture, vient modifier le milieu : réchauffement des eaux, sédimentation et eutrophisation, colonisation par des poissons adaptés aux eaux stagnantes...


Etang de Pontkalleg. Le Duc de Bretagne Jean II fait construire en 1262 une digue en contrebas du château. De cette chaussée subsistent deux avancées dans l'étang. Plus tard, les riverains habitant Kernascléden se plaignent des inondations et une nouvelle digue est construite 300 mètres en aval. Elle alimente alors un moulin.


Sur cette photographie des années 1900, on voit l'étang et, au second plan, le moulin de Tronchâteau ainsi que la nouvelle ligne de chemin de fer récemment construite.


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LES USAGES DOMESTIQUES DE L'EAU

Depuis sa sédentarisation, l'homme a installé son habitat à proximité de l'eau, y puisant pour son alimentation, sa toilette et l'abreuvement de ses bêtes. Fontaines, lavoirs et puits témoignent de ce passé récent où l'eau quoique partout présente, se mérite et se respecte, bien avant son arrivée au robinet.


DE LA SOURCE À LA FONTAINE
Ag ar vammenn d'ar feutan

Les fontaines, ces sources jaillissant de terre pour s'écouler dans une construction humaine, se multiplient aux 17è et 18è siècles en Basse-Bretagne près des hameaux. Elles facilitent l'accès à l'eau, allant de la source délimitée par des pierres à la fontaine-mur, le plus souvent à pignon triangulaire.

Moins nombreuses mais mieux conservées, les fontaines attachées à une chapelle sont plus élaborées : niche pour la statue du saint, décorations (boules, croix), bassins simples ou doubles et espace dallé clos de murets.

Ces fontaines purificatrices, dédiées à un saint parfois spécialiste, ont une fonction religieuse : elles servent de support aux demandes thérapeutiques (90% des demandes, y compris vétérinaires) et divinatoires.


Les lessives bi-annuelles (draps...) sont collectives et se font sur trois jours : le "Purgatoire" où l'on trempe le linge dans les baquets, 'l'Enfer" où l'on fait bouillir l'eau pour arroser le linge recouvert de cendres d'ajonc ou de pommier (riches en carbonate de potassium) et "le Paradis" où le linge, savonné, frotté, rincé, battu et essoré retrouve sa pureté avant de sécher sur l'herbe et les haies.


La demande de guérison s'accompagne de rites : faire des offrandes, se laver ou se mouiller une partie du corps, tremper un vêtement ou jeter un objet (pièces, épingles...) dans la fontaine, boire, s'immerger, y prendre l'eau, vider et nettoyer la fontaine, s'y rendre en procession.


Au 19è siècle, les fontaines à piliers de plan carré avec toit en pavillon souvent sans décor se développent en Morbihan.


AU LAVOIR
An douet

Alors que pendant longtemps la lessive s'est faite au bord de la rivière, la construction des lavoirs se développe à la fin du 18è siècle avec les notions d'hygiène.

Situés en bas d'une prairie dans le prolongement des fontaines, communs au village ou privés, les lavoirs sont typiques ; un bassin rectangulaire peu profond, délimité par des pierres de taille et des dalles inclinées sur lesquelles la lavandière frotte son linge.

Les lavoirs communaux, destinés aux lavandières professionnelles, sont parfois couverts (charpente en bois et tôle ondulée) et munis de deux bassins, le premier pour le rinçage, le second pour le lavage.

Le lavoir est le lieu de sociabilité féminine par excellence ; discussions, cancans et rires y vont bon train, compensant la pénibilité physique du travail, à genoux dans le carrosse, les mains dans l'eau en toute saison.

Pas question cependant de s'y rendre le jour du repos dominical et surtout la nuit si l'on ne voulait pas rencontrer les Lavandières de Nuit ; le passant imprudent les aidant à tordre le linge était retrouvé noyé.


Au 19è siècle et jusqu'au lendemain de la guerre 1939-1945, les blanchisseuses du Bas-Pont-Scorff sont fort réputées : elles lavent le linge des "Messieurs et Dames de Lorient" dans les lavoirs en hiver, au bord de la rivière à la belle saison. Le linge est acheminé par bateau, puis par la route. Les lavandières professionnelles sont également nombreuses à Lorient...




LE PUITS
Ar puns

Même s'ils ont la même fonction pratique que la fontaine, les puits ont l'avantage d'être situés au coeur du village. Avérés dès l'âge du Fer, ils accompagnent en Basse Bretagne le développement du bâti rural aux 19è et 17è siècles.

Le puits dit morbihannais se développe aux 18è et 19è siècles avant de céder la place au puits carré (fin 19è). Circulaire, il est surmonté d'une margelle monolithe et d'une superstructure à linteau sur piédroit, ornée de décoration (motifs sculptés tels que masques humains, date, nom du propriétaire...), parfois agrémentés de boules.

Le puits est soit à usage individuel, propre à une ferme, soit à usage commun. On dit d'ailleurs que les boules ornant le linteau désignent le nombre de foyers qui ont participé à sa fabrication et disposent d'un droit d'eau sur ce puits.

Les puits en chiffres :
Un premier inventaire par la commune de Langoëlan, territoire au patrimoine plutôt conservé, comptabilise 64 puits pour autant de hameaux. Dans 60% des cas, on n'en trouve qu'un par village, mais il n'est pas rare d'en trouver deux ou trois, voire plus au bourg et au grand village de Kenepevan (5).


L'un des plus anciens puits avéré en Vallée du Scorff se situe à Ploërdut au manoir de Kermapucano. Daté de 1619, c'est un puits circulaire à base moulurée.


Le linteau du puits abrite un rouet de bois traversé dans sa longueur par un axe de fer muni d'une manivelle. Ce mécanisme manuel permet par le déroulement de la corde de remplir le seau et même d'y descendre la crème et le beurre au frais en été. Une auge taillée dans le granite, destinée à abreuver les bêtes, jouxte souvent le puits.

Puits - Priziac et Kernascleden

Construire un puits demande de la technicité : une fois la nappe phréatique repérée par le sourcier et sa baguette, la gaine du puits est creusée et maçonnée au fur et à mesure de la descente (croisement des joints, pose en boutisse, calage à l'arrière...). On ne maçonne pas toujours jusqu'à l'eau, notamment si le terrain est rocheux.


DU PUITS AU ROBINET
Ag ar puns d'ar c'hog

Puits, lavoirs, fontaines sont pourtant délaissés et détruits après 1945. L'arrivée de l'eau au robinet va mettre fin à leur fonction pratique et sociale, d'autant plus qu'elle met aussi fin à la pénibilité des tâches liées à ces patrimoines.

La ville de Lorient, face à ses besoins croissants en eau, se dote déjà d'un réservoir alimenté par quatre sources en 1736. Le dispositif s'intensifie par des forages à Quéven en 1857 et par la mise en place entre 1887 et 1890 d'un captage dans 22 vallées naturelles. L'eau est acheminée par gravitation.

Il se renforce en 1910 par une prise d'eau directe dans le Scorff à Kereven à Pont-Scorff. En 1961, une nouvelle conduite remplace l'ensemble de l'ancien réseau, puis est complétée par l'eau du Blavet en 1973.

C'est aussi en 1955 que Calan, Cléguer, Gestel, Guidel, Pont-Scorff et Quéven créent un syndicat d'adduction d'eau pour prélever les eaux brutes du Scorff à Kereven. Ce réseau, avec les châteaux d'eau de Pont-Scorff, Gestel et Cléguer, privilégie d'abord les bourgs : les derniers villages sont desservis après 1970.

Même processus pour la seconde prise d'eau sur le Scorff à Plaisance à Ghémené-sur-Scorff, Lignol, Persquen et Locmalo à partir de 1960.

Dès lors, l'eau est accessible à tous : ce confort, renforcé par sa potabilisation, annonce néanmoins la fin de la gratuité de cette ressource vitale.

Conduite d'eau et regard  - Etang du verger Pont-Scorff

Le Scave, affluent du Scorff, est l'une des pièces maîtresses du réseau installé vers 1890. Les conduites d'eau sont reliées à des aqueducs qui aboutissent à Kerguilette avant d'être refoulées à l'aide de pompes à vapeur jusqu'au réservoir du Petit Paradis. Les regards permettent l'entretien du réseau.


Cette conduite récente, coincée entre l'assise de l'ancien pont du chemin de fer qui relie Lorient à Pont-Scorff au début du 20è siècle et la passerelle de randonnée installée en 2008, achemine l'eau du Scorff jusqu'à Kerguilette. Déjà en 1910, l'eau est traitée par air électrisé par la Compagnie Générale de l'Ozone.

Châteaux d'eau à Locmalo et Pont-Scorff

Le château d'eau symbolise cette révolution de l'accès à l'eau. Bien que marquant fortement le paysage, il passe aujourd'hui quasi inaperçu. Qui pense en le voyant à son rôle capital dans la vie quotidienne ?


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LES USAGES DE L'EAU EN AGRICULTURE

En vallée du Scorff comme ailleurs, l'agriculture est, depuis toujours, intimement liée à l'eau. Les usages de l'eau dans ce domaine sont multiples mais les traces laissées dans le paysage sont rares et peu visibles.Pourtant, pour qui se souvient, pour qui observe le sol, parfois les marques sont encore là.


LES PRÉS IRRIGUÉS
Ar flourennoù

C'est le cas, par exemple, des aménagements liés aux fleurennoù (flourenn au singulier) ou prairies humides. Le nom breton de ces parcelles situées en bordure des cours d'eaux rappelle la douceur des foins que l'on coupe tôt, au début du printemps.

Ces aménagements se sont généralisés tardivement en Bretagne, durant le 19è siècle avec l'essor de l'agronomie pour cesser de fonctionner dans les années 1950-1960. Leurs traces sont encore visibles dans les zones délaissées par l'agriculture. C'est le cas en bordure du Scorff et à proximité de ses affluents.

Un canal qu'il faut plutôt appeler ici une grosse rigole capte l'eau des ruisseaux et la conduit vers le haut des prairies bordant le Scorff. Ce canal conducteur (goach, pluriel goach'où en breton) distribue l'eau dans les prairies par un système très soigné.

Des passes sont réalisées régulièrement dans le canal : on en compte au moins deux par prairie. Une pierre disposée de chant, à un niveau plus bas, permet le débordement de l'eau sans pour autant qu'elle ne dévale la pente.


De petites rigoles courbes épousant le relief facilitent la distribution de l'eau sur l'ensemble de la surface. Ces prairies sont irriguées en plein hiver, permettant à la terre de ne pas être froide et à la végétation de démarrer plus tôt. Il y avait souvent deux coupes de foin et ensuite le bétail pouvait paître en bordure de l'eau.


Le système d'irrigation de Coët Cren près de Plouay, utilisé jusqu'aux années 1960, reste bien visible car les prairies ne sont plus exploitées depuis ce temps. L'installation du système a nécessité de gros travaux aux alentours de 1840, le chemin menant au moulin a été dévié et le canal de distribution desservant cinq prairies est creusé sur plusieurs centaines de mètres.

Moulin de Coët Cren


Les anciens agriculteurs se souviennent du travail que cela nécessitait : chaque année il fallait nettoyer les canaux, refaire les rigoles. Par contre, la qualité du foin et les rendements obtenus par ces prairies étaient un atout pour la ferme.


LE BÉLIER
Ar Maout

On retrouve aussi sur les affluents du Scorff les vestiges d'un système qui, pendant plusieurs dizaines d'années, a permis d'utiliser l'eau pour abreuver le bétail et les hommes avant l'apparition de l'eau courante dans les campagnes.

Inventé par J. de Montgolfier en 1796, le bélier est un système simple bien adapté à notre région. La seule énergie de l'eau entrant dans le bélier suffit à le faire fonctionner mais il faut au minimum un mètre de chute.

Il fonctionne de façon autonome et en permanence quand le débit de la source est suffisant. L'onde de choc provoque un bruit caractéristique, comme un coup de bélier qui a donné son nom au système. Par contre, son rendement n'est que de 20 à 30%, le reste retourne au ruisseau.


Grâce au bélier hydraulique, le château d'eau de Saint-Quidic en Plouay alimentait les maisons du village.


L'eau arrive avec force de la source 3 et sort par le clapet 1 (environ 70 à 80%)/ Cela provoque une onde de choc qui ouvre le clapet 5 et une petite quantité d'eau (20 à 30%) entre dans la cuve (ou la cloche) en y comprimant l'air qui se détend. La pression referme le clapet 5 en envoyant l'eau sous pression vers le château d'eau. L'onde de choc dissipé, l'eau s'engouffre à nouveau et le cycle redémarre.

O0O


Le Syndicat du bassin du Scorff nous présente Le Scorff à notre époque.
Y sont abordés les sujets tels que la description du cours d'eau et, y attenant, la faune et la flore, la production d'eau potable, la qualité de l'eau, l'activité économique, agriculture et industrie, pisciculture...
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3 commentaires:

  1. Que d’eau ! Que d’eau ! (lecture à haute voix recommandée)
    Depuis, de puits en puits, de pluie en pluie, de pis en pis, l’eau s’accommoda de n’être plus que H2O, traitée, maltraitée de toutes les usances et nuisances. Que même le Vittel menthe, que le diabolo ou diable à l’eau menthe aussi, quelle envie de pécher par eau mission.
    Adieu l’eau mère, l’eau fils, l’eau raison, l’eau bénite, l’eau bol, l’eau puce, l’eau suaire, l’eau Pâques !
    Adieu l’eau mage, l’eau rage, l’eau mare, l’eau pale, l’eau rangée, l’eau berge, l’eau tocard, l’eau truie, l’eau tarie, l’eau roc, l’eau vent, l’eau Samoual ;
    Au revoir l’eau blanche, la mer l’eau bleue, verte, turquoise, grise, l’eau céans ! L’eau claire, l’eau vive, l’eau libre, l’eau plate, l’eau minérale, l’eau pétillante, l’eau de Selz, l’eau ferrugineuse, l’eau de rose, l’eau oxygénée, l’eau du lac Lanolacabulo ! Les eaux mortes, les mortes eaux, les eaux tortes, les mille eaux, les grandes eaux, les basses eaux !
    Vive l’eau incolore, inodore et sans saveur, l’eau potable, l’eau chlorée, l’eau régale, l’eau lourde, l’eau courante, l’eau tiède, l’eau chaude à tous les étages, montez belle eau !
    A bas l’eau pression, l’eau gnon, l’eau Dieu m’en garde, l’eau rixe, l’eau primée.
    H2O mon amour ! De l’eau d’ace, encore de l’eau d’as (et surtout de l’O2) et la France sera sauvée !
    Un confiné qui songe à Lileho et au moulin de Kerfandol, à ce bon vieux TronScorff et à la mare de Len Vogé frissonnant sous le frais cresson bleu.

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