24/09/2017




JOSEPH AUDIC, docteur à GUÉMENÉ S/SCORFF
Médecin des Indiens d'Amérique

Voici une histoire peu commune... une histoire de bretons partis en Amérique au début XXème siècle.
Suivant l'exemple de citoyens s'en allant outre Atlantique, beaucoup tentèrent l'aventure dans l'espoir d'une vie nouvelle tels ces bretons de la région de Gourin espérant améliorer leur condition plutôt misérable. 
Pour la famille présentée aujourd'hui dans notre blog, les raisons sont autres. Ce sont des personnes économiquement installées et non nécessiteuses mais dont l'aventure est peu commune.


Au départ, un garçon Joseph Audic né en 1874 à Pontivy.
Élève brillant, le bretonnant Joseph fit des études de médecine à Nantes durant lesquelles il rencontra Marie-Lucie, fille d'un médecin Edouard Ménager. 
Le tout jeune diplômé obtiendra son premier poste de médecin à Guémené-sur-Scorff  en 1900, qu'il exercera 3 ans dans la cité Pourleth. 

Ci-dessous une intervention du Docteur Audic
Article  du JOURNAL de PONTIVY du 16 mars 1901



Parlons de cette famille Ménager... 
Edouard Ménager, né en 1851 était un médecin nantais installé depuis 28 ans. A 51 ans, il décide d'émigrer au Canada en famille avec 13 de ses 14 enfants. Les raisons de ce départ restent une énigme. La peur de la franc-maçonnerie pour cette famille assez traditionaliste put être l'un des motifs craignant de ne pouvoir élever ses enfants dans la foi catholique. N'oublions pas le contexte de l'époque, années 1880 à 1903 où l'on commence à critiquer les biens de l'église, le radical socialisme pointant son nez... certaines lois interdisant aux religieux quelque forme d'enseignement, dissolution et expulsion d'ordres religieux tels les Oblats (cités plus haut)... le tout conduisant à la Séparation de l'Eglise et l'État de 1905.

Après avoir vendu ses biens, dont une maison cossue, rue Clémenceau, Edouard Ménager, bien connu à Nantes, quitte la ville en mai 1903. Il achète aux Missionnaires Oblats de Marie à Paris une propriété à Duck Lake dans le Nord-Saskatchewan au Canada (lire cette page *). Il ne reviendra plus mais restera en contact avec les médecins en écrivant dans la gazette médicale de Nantes où il fit part de sa nouvelle expérience... (lire ce document *)


Notre médecin guémenois, Joseph Audic, se retrouve seul.
Il décide ainsi de partir un mois plus tard et quitte sa fonction guémenoise. Il embarque pour Duke Lake avec son père et son frère Louis. Après 5 jours et 5 nuits de voyage sur le Canadian Pacific Railways (3200 km), il rejoint sa fiancée le 25 juillet. Ils se marient le 02 septembre.
Ci-dessous la photo de mariage à Duke Lake 
Les mariés portent le costume traditionnel breton


Au Canada, les conditions de vie sont difficiles (une vie à défricher des terres incultes, constructions de huttes en rondins, lutte incessante contre les moustiques) et un climat très rude en hiver.
Les familles Ménager et Audic décident alors de chercher un endroit plus clément et descendront vers le sud, aux États-Unis à Spokane dans l'état de Washington (ne pas confondre avec la capitale) aux conditions climatiques plus océaniques et plus douces. Elles s'installent dans une ferme puis trouveront pied-à-terre à Spokane (voir carte plus haut).


Edouard Ménager veut reprendre son activité médicale. Ne parlant pas anglais il passe son examen en latin et obtiendra une licence de praticien en 1905, spécialité allopathie.

Joseph Audic travaillera d'abord dans un atelier d'architecture comme dessinateur, tout en passant les équivalences de ses diplômes de médecine. Il se porta alors volontaire pour travailler pour le Service de santé indien et obtient du gouvernement américain le titre de médecin dans des réserves indiennes.
C'est ainsi qu'il passe un an chez les "Coeurs d'Alène", dans l'Idaho, ainsi que chez les "Flatheads" et les "Nez Percés" dans le Montana et l'état de Washington.


La communication entre Joseph Audic et ses patients indiens n'est pas toute simple. 
Dans un entretien il dit parler par gestes, avoir appris quelques mots avouant que leur langue gutturale est très difficile.. Lorsque l'un des leurs était malade, un frère ou un ami venait avec deux chevaux, en attachait un devant la porte et s'en allait. Il ne restait plus qu'à enfourcher le cheval à demi-sauvage qui rentrait en droite ligne à son campement ne tenant aucun compte de ruisseaux ou des branches basses et des ronces, ni du pauvre chevalier qu'il était, cramponné à son encolure. A l'arrivée le médecin quelque peu ébranlé était conduit au chevet du malade.
Il déclare aussi distribuer du sirop contre la toux confectionné en marmite par son épouse et distribué en flacons.
Lui demandant comment il était payé, il donne l'exemple d'un accouchement difficile pour lequel il reçut trois poulets.

Les deux familles se sont adaptés au mode de vie assez rude américain. 
Cinq des enfants Ménager entrent dans les ordres, jésuites pour les garçons, ursulines pour les filles. Franck et Gabriel enseigneront à la Saint Ignatius Mission, et Anne-Marie dans les tribus Crow et Blackfoot du Montana.
Edouard Ménager, le pionnier, meurt en 1910 de la tuberculose.


Il sera inhumé à la Mission jésuite Saint-Ignatius dans le Montana au coeur de la réserve indienne des Flatheads.



Le retour en France... 1914

Après ces quelques années et cette nouvelle vie, le docteur Audic eut l'intention de devenir citoyen américain . Il déposa les documents nécessaires pour sa naturalisation. Cependant la première guerre mondiale arriva. Ses sentiment et devoir patriotiques seront plus forts d'où ce retour en France en août 1914 pour servir dans le corps médical de l'armée française. Malgré la situation difficile en France, son épouse Marie-Lucie et ses six enfants quittèrent l'Amérique sept mois plus tard pour être plus près de lui. Plusieurs de ses beaux-frères, Ménager (parmi lesquels des religieux), le suivront et mourront à la guerre.

Le conflit terminé, la famille s'installera à Vannes (quatre autres enfants naîtront). Joseph Audic exercera son métier de médecin. Il dédia le reste de sa vie à s'occuper des personnes défavorisées et démunies. On le surnomma le "Médecin des Pauvres".
J.Audic sera également membre de la Sté Polymathique du Morbihan.

Marie-Lucie décédera en 1950 et Joseph en 1969.

La Ville de Vannes baptisera une rue en son honneur 
" Rue du Docteur Joseph Audic"





REMERCIEMENTS à BRETAGNE TRANSAMERICA




un magnifique ouvrage sur le photographe américain
EDWARD CURTIS


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4 commentaires:

  1. Je me souvient tres du docteur Audic.Dans les annees 50 ma mere a travaille avec lui dans les service des pensionnes de guerre a Vannes.Je le vois encore dans les rues de Vannes sur son velo sa grande barbe blanche au vent.
    Il habitait sur la place du port.J'avait entre 8 et 12 ans
    Jp JJjaouen@sfr.fr

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  2. Est il possible de connaître l'auteur de cet article, très bien renseigné. Il s'agit de mon grand père, qui a vécu chez nous à Nantes jusqu'à son décès. Il est vrai qu'il me paraissait extraordinaire... AMénager.

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  3. Message du 12 juillet 2020 : Ecrivez-nous à cette adresse mail guemenesscorff@gmail.com

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  4. J’ai très bien connu l’un de ses fils qui était jésuite en Chine où mes parents enseignaient à l’université Aurore.

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