LA CROIX DU MARQUIS
INGUINIEL
un cavalier fut abattu le 23 juin 1675
INGUINIEL
un cavalier fut abattu le 23 juin 1675
La rue principale du bourg d’Inguiniel fut le théâtre d’un drame singulier à la fin du XVIIème siècle.
A la sortie du bourg d'Inguiniel, sur la route en direction de Plouay, se trouve une croix, dite "du Marquis" au lieu dit de "Pont-er-Len". Cette croix, que l'on a peine à distinguer de part l'environnement actuel, fut le résultat visible d'un tragique événement entre deux familles...
Afin de mieux comprendre cette histoire, situons là en l'époque, présentant, en quelques lignes, les deux familles nobles voisines concernées : De Guer de Pont-Callec et De Méhenrec de Saint-Pierre.
- Alain de Guer (1628-1702) est l'héritier d'une famille de Malestroit venue à Pontcallec dès le 15ème siècle. Le jeune roi de France Louis XIV lui confère le titre de marquis en 1657. Doté d'une belle fortune, le premier marquis de Pont-Callec connaîtra les honneurs, les humiliations de la ruine de part une gestion accablante de ses biens, pour finir dans les ordres en 1679.
De ses nombreux enfants, nous retiendrons les deux premiers garçons Charles-René successeur de son père en 1673 et Jean-Bertrand, ici concerné, baron des Aubrays, écuyer de la Grande Écurie du roi.
- Le marquis Pierre Méhérenc de Saint-Pierre (origine normande) avaient acquis des terres bretonnes en mars 1641. La famille possédait aussi le château de St Pierre de Beauregard dans la vallée de Chevreuse. Il résidait au moulin de Cunffio sur la commune actuelle d'Inguiniel, qui aurait dépendu de la Juridiction de Pont-Callec "dont le chef de nom et d'armes de Guer" restait seigneur dominant.
Pierre Méherenc avait un fils, Gabriel.
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LE DUEL
Ce seigneur de Pontcallec était orgueilleux et violent. Une version dit qu'une tradition obligeait les vassaux à rendre l’hommage chaque année au seigneur de Pontcallec. Gabriel, son voisin de Cunffio, qui se considérait l'égal de Jean-Bertrand de Guer, ne l’entendait pas ainsi. Par ailleurs, Pontcallec, dont la famille était de vieille souche bretonne, supportait difficilement la présence de cette famille normande dans cette contrée dont il se considérait le maître. De plus Gabriel n'aimait pas trop le clergé d'Inguiniel.
Jean-Bertrand de Guer s’élança le premier, le tirage au sort lui ayant été défavorable. Il passe à toute allure sous la lucarne où se trouve Méhérenc. Une détonation. Il sort indemne.
A son tour, le seigneur de Cunffio monte en selle. Il serait dit, qu'avant de tirer, J.B de Guer, quelque peu mystique, aurait pris soin d'étaler de la paille de seigle sous ses pieds, prétendant détenir, de ce fait, un pouvoir le rendant invulnérable en cas d'agression sur terre (donc à cheval) ou sur eau.
Pontcallec ajuste et tire. Méhérenc s’affaisse, le cheval s’emballe, entraînant le cavalier dont le pied est resté dans l’étrier.
Le cavalier meurt.
C'est un moment tragique dont la famille de Guer de Pontcallec se serait bien passée en plus de leurs problèmes financiers. Le père Alain est effondré... le nom de Guer étant sali à jamais. Il demandera l'emprisonnement de son fils Jean-Bertrand auprès de la sénéchaussée d'Hennebont à la prison St Lazare à Paris, prison des "fils de famille" (lire *). Il restera enfermé jusqu'au jugement de son père.
La famille du défunt fit alors ériger une croix à l’endroit où Gabriel de Méhérenc a trouvé la mort.
COMMENTAIRES
La Revue Morbihannaise* de 1911 (article signé J.F. Cadoux) a classifié l'événement comme "un duel judiciaire" à partir d'une tradition orale recueillie vraisemblablement sur place et perpétuée sous le nom de "duel au carreau". Aucune trace écrite de ce duel n'a été retrouvée, même sous forme d'allusion, ce qui n'est pas étonnant puisque la royauté l'interdisait et que Richelieu avait prévu la peine de mort à la seconde infraction. Il existe une autre version : le marquis de Pont-Callec aurait fait "justice" lui-même et d'un pailler aurait abattu l'autre seigneur.
La famille de Méherenc de Saint-Pierre avait acquis leurs terres le 26 mars 1641 ; elles dépendaient de la juridiction de Pont-Callec "dont le nom et d'armes de Guer" restait seigneur dominant. Que le marquis de Saint-Pierre ait perdu la vie pour ne pas avoir voulu rendre hommage à Jean-Bertrand de Guer appartient à une logique cohérente mais qui, comme les conditions de sa mort, relève de l'hypothèse invérifiable.
La tradition orale et la mémoire des descendants de Gabriel de Méhérenc concordent sur un point : le cavalier aurait été abattu le 23 juin 1675 à la sortie du bourg d'Inguiniel ; le pied pris dans l'étrier la victime aurait été traîné jusqu'au lieu du décès, à l'emplacement où a été édifiée "la Croix du Marquis". Seuls le lieu et la date sont certains.
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PHOTOS
La croix de Pont-er-Len
une photo ancienne et une plus récente
dans son environnement actuel.
je ne connaissais pas. je m'y arrêterai un de ces jours.
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